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Tale S1 conférence de Cédric Villani

Des triangles, des gaz et des hommes
Conférence de Cédric Villani au Lycée Louis-le-Grand
Sortie des Terminales S 1

Des triangles, des gaz et des hommes : l’intitulé pour le moins surprenant de cette conférence lie trois concepts sans rapport évident ; c’est en fait l’esprit même de cette intervention. Cédric Villani s’est en effet attaché à nous montrer comment ses travaux avaient pu réunir trois mathématiciens -Bernhard Riemann, Ludwig Boltzmann et Leonid Kantorovitch- dans trois domaines du vaste monde mathématique.

Mais avant de détailler son intervention, il nous faut présenter Cédric Villani : mathématicien français, chercheur, il a reçu, en 2010, la médaille Fields, la plus haute distinction décernée pour les mathématiciens de moins de quarante ans. Plus étonnant, il est également connu pour son allure XIXème siècle, en redingote et lavallière, broche-araignée qui le rend immédiatement reconnaissable - le directeur du lycée Louis-le-Grand n’a d’ailleurs pas manqué de faire une remarque amusée à ce sujet en introduisant Cédric Villani. Mais le dandy laisse bientôt place au chercheur, et surtout au pédagogue : il s’exprime avec clarté, humour, et même avec une certaine sensibilité, artistique en un sens, puisqu’il veut dévoiler la beauté d’un problème, de ses implications. Il n’a de cesse de relier les mathématiques à leur histoire, voire à des notions plus philosophiques, permettant ainsi d’avoir une idée riche et foisonnante de ce que sont les mathématiques.

L’exemple dont il s’est saisi en début de conférence est assez représentatif de cette conception : les mathématiques pourraient trouver une allégorie dans la légende de la Dame de Shalott, condamnée par un sortilège à ne regarder du monde que son reflet dans un miroir. Cependant lorsque passe le chevalier Lancelot elle ne peut s’empêcher de se retourner pour l’admirer et meurt. Les mathématiques, comme la Dame de Shalott, ne peuvent saisir la réalité du monde mais seulement une image, jamais l’on ne mêle expérience et mathématiques, analyse Cédric Villani, même si les mathématiques se retrouvent dans d’autres domaines comme la physique.
La Dame de Shalott par William Maw Egley (1826-1916)

Par ailleurs les mathématiques ouvrent un monde où tout problème résolu en appelle un autre, dans un mouvement qui semble infini. Parmi les problèmes encore non résolus, on peut citer la célèbre hypothèse de Riemann, qui débouche sur des domaines très divers : nombres premiers, physique quantique…
L’hypothèse de Riemann

Cela permet à Cédric Villani d’introduire Riemannn et sa géométrie dite riemannienne, première pièce de sa démonstration. Cette géométrie s’applique aux surfaces courbes, comme un globe terrestre, en définissant les géodésiques.

Bernhard Riemann (1826-1866)

Après avoir évoqué d’autres éléments sur Riemann, Cédric Villani introduit la seconde figure de son exposé, Ludwig Boltzmann, qui travailla sur l’entropie des particules d’un gaz libéré dans une boite, c’est à dire le degré de désordre de ces particules au cours du temps.

L’équation de Boltzmann, qui exprime l’entropie S en fonction du nombre W (pour Wahrscheinlichkeit, « probabilité » en allemand) d’états possibles pour les particules dans un système fermé, avec k la constante de Boltzmann.

Ceci est relié à la statistique, c’est à dire à d’autres notions des probabilités, comme la courbe de Gauss, thème que Cédric Villani développe. Cette étonnante "suprem law of unreason", aussi appelée loi des erreurs, gouverne l’aléatoire. Cédric Villani indique ensuite quels problèmes découlent de l’équation de Boltzmann, comme la vitesse d’évolution cette entropie, la recherche de l’entropie maximale… Il nous en a également indiqué les applications, plus surprenantes les unes que les autres : densité des étoiles dans une galaxie, mécanique des fluides, modélisation des tsunamis, utilisée par Hollywood pour les films catastrophe…
Ludwig Boltzmann (1844-1906)

La dernière figure et son univers c’est celle de Leonid Kantorovitch, mathématicien et prix Nobel d’économie qui étudia des applications pratiques des mathématiques, notamment en ce qui concerne la planification de l’économie (Kantorovitch vivait en URSS) et l’optimisation, de la production industrielle ou du prix des taxis.
Leonid Kantorovitch (1912-1986)

A propos de cette thématique de la planification en URSS, Cédric Villani cite un ouvrage de Francis Spufford, Red Plenty. Cette planification est un thème assez passionnant puisque les mathématiques les plus pures s’appliquent alors à la vie quotidienne, au concret.
Red Plenty

Vient enfin le lien qui doit relier ces trois figures : les travaux que mena Cédric Villani, avec Felix Otto et John Lott dans les années 1990 à propos du "gaz paresseux" : comment un gaz (entropie de Boltzmann) peut il passer d’une forme à l’autre (trajectoire, courbe de Riemann) en utilisant le moins d’énergie (optimisation de Kantorovitch) ? Cédric Villani insiste sur sur le caractère assez fortuit du début de ses recherches : ces recherches qui permettent une rencontre des trois théories mathématiques de Boltzmann, Riemann et Kantorovitch, sont elles-mêmes le fruit d’une rencontre inopinée entre mathématiciens, Cédric Villani, Felix Otto et John Lott.

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Félix Otto
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Cédric Villani
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John Lott

Plus que la découverte de trois mathématiciens, cette conférence peut ainsi se lire à plusieurs niveaux : elle présente le monde de la recherche, sa dimension essentiellement humaine, quelque peu aléatoire car liée aux rencontres, mais elle introduit aussi une certaine vision du monde des mathématiques, comme une infinité de possibilités auxquelles l’homme est confronté et qu’il peut explorer.
Etty, Tale S1


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